Prix des lectrices et des lecteurs 2024-2025 Interviews des auteurs et autrices sélectionné.e.s
À l'occasion du Prix des lectrices et des lecteurs 2024-2025, les autrices et auteurs sélectionné.e.s ont répondu à nos questions sur leur travail ! Découvrez ainsi les interviews de Bénédicte Dupré La Tour, Stéphane Giusti, Alix Lerasle, Eliot Ruffel et Guillaume Viry. Pour rappel : vous avez jusqu’au 6 mars pour voter pour votre premier roman préféré, en ligne ou dans les bibliothèques participantes. Le lauréat sera dévoilé le 12 avril au festival du Livre de Paris.
Les interviews
© DR / Du Panseur
Bénédicte Dupré La Tour
« Enfant et adolescente, j’ai englouti des rayons entiers de la bibliothèque municipale, puis celle de mon collège, notamment dans les domaines de l’horreur, la fantasy, la science-fiction, l’aventure. »
autrice de Terres Promises (Ed. Du Panseur)
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Pouvez-vous résumer votre roman en quelques phrases ?
Dans un hypothétique Grand Ouest, huit personnages vivent l’envers de l’invasion d’un territoire immense et hostile. Les terres ne donnent rien et les corps rechignent à se laisser dompter. Les bourgades efflanquées surgissent comme des illusions, les rêves s’évaporent dans le harassement quotidien, les promesses d’ailleurs se transforment en nostalgie. Une prostituée, un orpailleur, une indigène, un pasteur, une fermière, un chasseur... autant de destins des perdants de l’histoire, tissés autour d’un déserteur, qui écrit à ses proches en attendant d’être pendu. Terres promises est un roman choral où rien ne se conquiert, tout se perd, où Dieu est absent malgré les prières. Les terres comme les corps possédés finissent par obséder leur propriétaire. Et l’invasion va jusqu’à coloniser les imaginaires.
C’est votre première publication, mais écrivez-vous depuis longtemps ?
Cela fait plus de dix ans que je m’emploie à écrire, testant des formes, des bouts de récits, des projets de romans plus ou moins réussis. Dix ans, ça peut paraître long, mais le temps m’a toujours manqué pour écrire, il m’a fallu sans cesse le voler aux contingences de la vie. Ces effractions sont des espaces de liberté et d’intimité absolues. Je n’en ai jamais trouvé nulle part de semblables.
Quand vous avez appris que vous étiez sélectionnée pour le Prix des lecteurs des Bibliothèques de la Ville de Paris, quelle a été votre réaction ?
Les lecteurs ont la vertu de n’être payés par personne pour donner leur sentiment de lecture. Leur regard est le plus authentique qui soit. Être sélectionnée pour votre prix a donc une saveur toute particulière, celle d’être jugée sur mon travail par ceux auquel il se destine : les lecteurs. Ils sont de toutes sortes et cela me plait infiniment. Qu’ils aiment ou qu’ils n’aiment pas mon roman, ils le diront sans détour et sans fard.
Fréquentez-vous une bibliothèque ou une médiathèque ?
Il m’arrive de fréquenter la bibliothèque de mon quartier, pour emprunter des romans et des bandes dessinées. J’y vais moins souvent qu’auparavant. Sans doute parce que mes enfants sont plus grands. Enfant et adolescente, j’ai englouti des rayons entiers de la bibliothèque municipale, puis celle de mon collège, notamment dans les domaines de l’horreur, la fantasy, la science-fiction, l’aventure. Sans doute considérait-on que ces activités étaient convenables pour des jeunes filles, et qu’il était préférable de nous voir, ma sœur et moi, plongées dans des livres plutôt que passionnées par le maquillage ou les garçons. Quelle erreur de jugement. Les livres sont une transgression. Et par extension, les bibliothèques.
Est-ce qu’il y a un premier roman qui vous a marquée ou que vous recommandez ?
J’ai découvert il y a une dizaine d’années le travail d’Alain Damasio, avec La zone du dehors, son premier roman. Il m’a estomaquée. Je voue une grande admiration pour cet auteur, qui use de la littérature de l’imaginaire de façon magistrale pour questionner notre civilisation et ses errances.
© Olivier Rieu
Stéphane Giusti
« J’ai toujours écrit des romans, des nouvelles ou des poésies. Depuis mon enfance, je n’ai cessé de remplir des cahiers ou des carnets de notes. »
auteur de Le juif rouge (Ed. Seghers)
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Pouvez-vous résumer votre roman en quelques phrases ?
"Le Juif rouge" Aaron Tamerlan Munteanu, géant roux, né juif et roumain en 1883, se révèle être le dernier Juif Rouge, guerrier immortel des légendes ashkénazes sensé venir libérer les juifs de leur oppression millénaire. Condamné lui aussi à l’éternité, il arrive au pire moment du siècle, alors que l’Europe est brisée par les guerres successives, rongée par un antisémitisme meurtrier qui devient de plus en plus implacable. Entre Don Quichotte et un super Héros qui ne reculerait devant rien, Aaron sillonne le temps afin d’inverser le cours de l’Histoire et peut-être, sauver qui peut l’être et redonner à l’âme humaine un peu de sa grandeur perdue.
C’est votre première publication, mais écrivez-vous depuis longtemps ?
J’ai toujours écrit des romans, des nouvelles ou des poésies. Depuis mon enfance, je n’ai cessé de remplir des cahiers ou des carnets de notes. Mais j’avais en même temps le désir de faire des films, mes histoires oscillaient entre un univers purement littéraire et cinématographique. J’ai opté pour le second… Et le temps passant, l’âge sans doute, l’instinct de littérature est revenu et j’ai repris l’écriture de romans. Le juif rouge est né de cette volonté de continuer ce que j’avais peut-être perdu dans le monde des images, et de redonner la priorité aux mots.
Quand vous avez appris que vous étiez sélectionné pour le Prix des lecteurs des Bibliothèques de la Ville de Paris, quelle a été votre réaction ?
Le Prix des lectrices et des lecteurs des bibliothèques de la ville de Paris revêt une valeur à la fois prestigieuse et symbolique, et sans doute plus humaine. D’une part, il est décerné par des lecteurs, premiers destinataires du roman que l’on écrit. Leur jugement, leurs impressions et comptes rendus de lectures sont toujours une récompense, quelle que soit leurs préférences ou sentiments. L’écriture est un partage, et savoir que des lectrices et des lecteurs s’attachent à nos mots nous les rend plus proches, et nous pousse aussi à vouloir poursuivre ce travail d’écriture. Ensuite, le fait que le nom de Paris soit associé au prix donne une reconnaissance supplémentaire, en ce sens que la ville demeure un symbole de culture universelle, englobant certes tous les arts mais principalement, la littérature.
Fréquentez-vous une bibliothèque ou une médiathèque ?
Je vis à Londres en Grande Bretagne depuis plus de dix ans maintenant. Les bibliothèques et médiathèques municipales ne fonctionnent pas comme en France. J’ai toutefois le privilège de pouvoir fréquenter la British Library, du moins en ce qui concerne la consultation d’ouvrages historiques ou de cartes, dont le fond est prodigieux. Je suis également membre de la Wiener Holocaust Library, qui est la plus vieille bibliothèque du monde concernant l’étude de Shoah, de ses causes et héritages.
Est-ce qu’il y a un premier roman qui vous a marqué ou que vous recommandez ?
La question du premier roman est extrêmement difficile. Il y en a tant, et beaucoup que j’aime ou ai aimé. J’avais particulièrement aimé le premier roman de Chloé Aridjis, le livre des nuages, et été frappé par sa grande poésie, son côté parfois hallucinatoire mais toujours avec une grande retenue, une extrême délicatesse de style. Mais c’était deja en 2009 je crois… Plus près de nous, je retiendrai Le lâche de Jarred McGinnis, en 2022. Un roman très percutant, sur le handicap, traité parfois avec un humour froid et acerbe qui rend le personnage très attachant. Mais cela fait deux romans…
© DR / Castor astral
Alix Lerasle
« Je crois beaucoup en l'importance des prix de lecteurs et lectrices, et également parce que je suis très attachée aux bibliothèques en général et à l'accessibilité des livres. »
autrice de Du verre entre les doigts (Ed. Castor Astral)
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Pouvez-vous résumer votre roman en quelques phrases ?
Une petite fille, la narratrice, nous raconte son quotidien à l’intérieur de sa maison. Elle y vit avec sa mère et son curieux petit frère Nati, un personnage plein de tendresse et de singularité. La famille traverse des évènements douloureux, que la narratrice va raconter tout en tentant d’en comprendre le sens.
C’est votre première publication, mais écrivez-vous depuis longtemps ?
J’écris depuis mon enfance, sans ambition particulière, pour le plaisir. J’écris aussi de la poésie depuis plusieurs années (un premier recueil sorti aux éditions Cheyne en 2022).
Quand vous avez appris que vous étiez sélectionnée pour le Prix des lecteurs des Bibliothèques de la Ville de Paris, quelle a été votre réaction ?
Ce prix a beaucoup de sens pour moi et je suis très touchée d’être dans la sélection. Cela résonne tout particulièrement car je crois beaucoup en l’importance des prix de lecteurs et lectrices, et également parce que je suis très attachée aux bibliothèques en général et à l’accessibilité des livres.
Fréquentez-vous une bibliothèque ou une médiathèque ?
Je fréquente régulièrement les médiathèques de la ville où je vis, je peux y passer beaucoup de temps. J’ai aussi beaucoup travaillé dans les bibliothèques, et mon roman a en partie été écrit dans une bibliothèque.
Est-ce qu’il y a un premier roman qui vous a marquée ou que vous recommandez ?
J’ai personnellement adoré La petite dernière, le premier roman de Fatima Daas, c’est un livre que j’ai beaucoup relu et que j’ai beaucoup conseillé !
© Patrice Normand - L'Olivier
Eliot Ruffel
« Se savoir entourer, de livres comme de films, a toujours un côté rassurant.»
« Se savoir entourer, de livres comme de films, a toujours un côté rassurant.»
auteur de Après ça (Ed. de l'Olivier)
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Pouvez-vous résumer votre roman en quelques phrases ?
Après ça raconte une histoire d’amitié entre Max et Lou, deux jeunes de 18 ans qui tentent de tromper l’ennui durant des vacances d’été qu’ils trouvent trop longues, à regarder les ferries partir en direction de l’Angleterre et à errer sur la côte normande. En arrière-plan se joue la question du passage précipité à l’âge adulte, d’une violence familiale feutrée et de longs silences, parfois drôles et parfois grinçants.
C’est votre première publication, mais écrivez-vous depuis longtemps ?
Je suis arrivé « tard » à l’écriture, il y a de ça 4 ans. Il m’a fallu passer par la photographie, par la vidéo et par le scénario avant de vraiment envisager une narration à des fins littéraires.
Quand vous avez appris que vous étiez sélectionné pour le Prix des lecteurs des Bibliothèques de la Ville de Paris, quelle a été votre réaction ?
Bien sûr ! Tout simplement parce qu’il s’agit d’un prix décerné en partie par des lecteurs et lectrices, par des personnes qui sans cette sélection n’auraient peut-être jamais rencontré ce texte. C’est une des grandes forces de ce prix, de donner une voix à un large public.
Fréquentez-vous une bibliothèque ou une médiathèque ?
Très souvent, c’est même principalement dans des bibliothèques que je travaille. Se savoir entourer, de livres comme de films, a toujours un côté rassurant.
Est-ce qu’il y a un premier roman qui vous a marqué ou que vous recommandez ?
Il y en a tellement ! Mais celui que je recommande est Le lapin de Chloé Delchini.
© Tonatiuh Ambrosetti
Guillaume Viry
« C’est un prix de passionnés de littérature, indépendant, rien ne peut me faire plus plaisir.»
« C’est un prix de passionnés de littérature, indépendant, rien ne peut me faire plus plaisir.»
auteur de L'appelé (Ed. du Canoë)
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Pouvez-vous résumer votre roman en quelques phrases ?
Le roman explore le destin brisé de Jean, appelé en Algérie, et le silence assourdissant autour de cette guerre qui résonne encore aujourd’hui au sein de sa famille.
C’est votre première publication, mais écrivez-vous depuis longtemps ?
Je crois que la première fois que j’ai écrit c’est à 16, 17 ans, un roman, écrit à la main, que je n’ai jamais fait lire et heureusement sans doute !
Puis plus tard j’ai écrit des scénarios de films.
Et c’est finalement récemment que je suis revenu à l’écriture romanesque.
C’est d’ailleurs complétement différent pour moi, cela prend naissance ailleurs, dans un endroit beaucoup plus secret. J’écris lorsque quelque chose m’y oblige.
Quand vous avez appris que vous étiez sélectionné pour le Prix des lecteurs des Bibliothèques de la Ville de Paris, quelle a été votre réaction ?
Que des bibliothécaires aient été touchés par mon texte et que le livre puisse maintenant passer de mains en mains des lecteurs et lectrices, est très émouvant.
C’est un prix de passionnés de littérature, indépendant, rien ne peut me faire plus plaisir.
Fréquentez-vous une bibliothèque ou une médiathèque ?
Oui, la médiathèque Françoise Sagan, pas loin de chez moi, j’aime ce lieu, je peux y rester toute la journée !
Plus jeune, lors de mes études, j’ai beaucoup fréquenté la bibliothèque du Centre Pompidou.
Est-ce qu’il y a un premier roman qui vous a marqué ou que vous recommandez ?
Les champs d’honneur de Jean Rouaud. Cela ne date pas d’hier, mais j’en ai encore le souvenir précis de ma lecture, un magnifique texte.
Jusqu'au 6 mars, cliquez ici ou rendez vous dans l'une des 30 bibliothèques participantes pour voter pour votre premier roman préféré !