Temps fort "Le lieu comme personnage" Géographie humaine : quand le lieu prend vie
Couverture du roman "Le chant de la rivière" de Wendy Delormel (ed. Cambourakis)
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“Nos terres, c'est comme nos rivières : opaques, lentes, violentes, créant la vie des hommes à leur image : implacable et méditative.”
William Faulkner in : Tandis que j'agonise.
Nul n'a su mieux que William Faulkner évoquer le lien qui unit l'homme à sa terre, matrice originelle et personnage à part entière.
Le lieu est bien plus qu'un cadre géographique dans certains romans.
Dans Le Quatuor d'Alexandrie de Lawrence Durrell, il accède à une dimension mythique, nimbé de mystère et d'érotisme. Ode à une ville rêvée autant que rencontrée, l'œuvre de l'écrivain britannique a envoûté des générations de lecteurs.
Le lieu peut aussi suggérer un destin tragique qui se transmet de génération en génération. Qu'on songe aux villageois de Macondo voués fatalement à la misère dans Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez ou aux Deux frères du brésilien Milton Hatoum, enfermés dans leur rivalité délétère dans le cadre baroque de Manaus au début du vingtième siècle.
Avec originalité, dans son roman La casa, l’écrivain argentin Manuel Mujica-Lainez (1910-1984) illustre cette idée de décadence en donnant la parole à une maison patricienne de Buenos Aires décrépite et squattée. La maison raconte la vie de ses riches occupants et les épisodes qui les ont conduits à leur perte.
En effet, dans leur permanence, les lieux sont les témoins de l'histoire, petite ou grande.
C’est avec l’idée de faire parler les lieux les plus ordinaires que le journaliste et écrivain Jean Rolin sillonne le monde et la France depuis plus de deux décennies. Ses enquêtes placent l’humain au premier plan, mais toujours dans un cadre géographique précis. Il se situe au carrefour de l’histoire, de la sociologie et du journalisme.
Patrick Deville, quant à lui, a adopté le parti-pris du roman sans fiction il y a trente ans. Il s'est fixé comme projet de rédiger douze livres comme autant d'étapes d'un tour du monde érudit et curieux.
À chaque destination correspond une biographie d'un personnage marquant de l'histoire mondiale du XIXème siècle. Il illustre ainsi le prodigieux développement des échanges culturels et commerciaux qui a marqué le XIXème siècle et se poursuit de nos jours. Né à Saint-Nazaire, Patrick Deville été naturellement fasciné très tôt par la marine et les voyages. C’est d’ailleurs à sa ville natale qu’il a consacré son dernier ouvrage, mêlant souvenirs, introspection et réflexion historique.
De manière générale. cette tension que l'on perçoit entre l'intime et le lointain chez Patrick Deville est une source d'inspiration féconde dans le roman contemporain.
L'ouvrage Lisière de Kapka Kassabova, en est un très bon exemple. Récit intime, il nous fait pénétrer l'âme de la Bulgarie avec ses légendes, son histoire si riche et sa chaleur humaine. L'écrivaine bulgare émigrée en Grande-Bretagne est revenue dans son pays natal confronter ses souvenirs d'enfance à la réalité dans une région frontalière particulièrement bouleversée par la chute du régime socialiste.
De tels livres donnent du sens à l'expression : géographie humaine.
Alors assurément, on peut parler du lieu comme personnage.
L'expression latine : genius loci (c'est à dire : le génie des lieux) en atteste depuis l'antiquité.
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Par Marie-Aulde L., bibliothèque Claude Levi-Strauss
Temps fort "Le lieu comme personnage"
Au mois de mars les bibliothèques parisiennes célébreront la Semaine de la langue française et le Printemps des Poètes à travers une thématique captivante : « le lieu comme personnage » !